top of page

IMPACT

Travaux de Iris Séné et Ludovic Austry

LA PLACE THEATRE DE L'EVENEMENT

Studio de projet urbain

ENSA PARIS MALAQUAIS, 2015 

Master 1/2, semestre 1

Encadrants responsables

Can Onaner et Xavier Fabre

Le studio de projet portera sur l’espace public et sa capacité à permettre l’évènement. Il questionnera les valeurs et enjeux dont sont porteurs actuellement les places et les lieux collectifs. Prenant comme exemple des événements sociétaux et politiques impliquant l’occupation de l’espace public, le studio s’intéressera au rôle des places et de l’architecture comme théâtres d’un événement singulier.

 

Des manifestations sur l’espace public comme celles du mouvement Occupy, des révoltes urbaines comme celles de Tahrir et Taksim, mais aussi des interventions et performances artistiques à plus petite échelle, utilisent l’espace public et son environnement architectural comme des dispositifs privilégiés pour leurs actions dont certaines sont programmées, d’autres spontanées et imprévisibles. La particularité de ces différents événements est d’occuper l’espace et d’immobiliser la vie urbaine pour un certain temps.

 

Dans le cas des événements sur la place Taksim et le parc Gezi à Istanbul en 2013, comme dans celui de la place Tahrir au Caire en 2010, l’image qui nous accapare est celle de places remplies d’une foule d’individus. La place devient à cet instant un espace-temps particulier : un milieu coupé du reste de la ville autant qu’elle génère une temporalité qui lui est propre. Au-delà des images de violences policières, des affrontements entre les manifestants et les forces de l’ordre, l’impression que l’on garde de ces deux places occupées pendant plusieurs jours, est celle d’une insularité autant spatiale que politique : des îles suspendues au milieu de la ville.

 

Si l’architecture et les infrastructures urbaines ne sont pas dans un premier temps conçus pour accueillir de tels événements, si l’on veut bien considérer que, dans son rapport à la permanence, l’architecture est « neutre » d’un point de vue idéologique, au moment même des événements, sa physionomie change et sa teneur symbolique se modifie parfois radicalement.

 

Une fois que les événements sont terminés et que la parenthèse spatiotemporelle est refermée, l’architecture et la place gardent malgré tout les traces et les symptômes des événements passés, surtout si ces événements ont été marquants d’un point de vue social et politique.

Dessins des étudiant.e.s : Iris Séné et Ludovic Austry

Enjeux pédagogiques

L’objectif théorique du projet est d’amener les étudiants à s’interroger sur les rapports entre une « scénographie de l’événement » – que l’on pourrait dé nir comme une transformation momentanée d’un lieu physique préexistant – et une « architecture après l’événement » qui doit de nouveau s’inscrire dans la longue durée en prenant en compte les traces de l’événement sur la place.

 

Quelles sont les transformations physiques et symboliques imposées à la place et à l’architecture au moment même d’un événement ? Comment, une fois l’événement passé, l’architecte peut-il intervenir dans de tels environnements chargés d’une mémoire collective ? L’architecture et la place urbaine constituent-elles un échiquier neutre et par nature ambivalent où pourraient se dérouler des événements de tout type, aux conséquences sociales les plus libératrices comme les plus néfastes ? Ou alors doit-on considérer que cet échiquier, parce qu’il est habité et manipulé par les différents rapports de force, n’est par définition pas neutre, et qu’il implique par conséquent l’architecte dans ces rapports de pouvoir ?

 

Déroulement et méthodes

L’espace de l’évènement social sera étudié en trois temps / trois exercices : analyse de l’existant, préparation d’un évènement éphémère, construction d’un édifice.

 

- La première étape implique une connaissance du site dans son histoire et dans sa physionomie. Il s’agirait d’utiliser aussi bien des méthodes d’analyse classique (typologique et morphologique) que des outils de lectures plus expérimentaux. Les étudiants seront amenés à découvrir des modes d’enregistrement des dynamiques humaines, des latences, tensions et désirs qui animent le site, puisque l’enjeu est d’anticiper et d’imaginer un événement qui pourrait y avoir lieu.
Pour cette première étape, un développement sera effectué sur l’histoire et la formation des places publiques, leur rôle dans la construction de la vie urbaine, les pratiques récentes qui s’y déploient.

 

- La seconde étape consistera à décrire un événement dans le temps et dans l’espace, en considérant que la place et l’architecture qui l’entoure deviennent le théâtre vivant de cet événement. Il s’agira de montrer comment, pendant cet instant suspendu de la vie de la place, l’image, la morphologie et la signification de la place se modifient en donnant lieu à des scènes inédites impliquant l’architecture et les infrastructures autour de la place. Cet exercice se fera essentiellement par le texte (description détaillée de l’événement), par la maquette scénographique (mise en scène de l’événement) et photographies de maquette et collages pour décrire le déroulement de l’événement par l’image.
Pour cette seconde étape, un travail de référence sera développé à partir d’architectes modernes ou contemporains ayant travaillés autour de la notion d’événement, et s’opposant à la tradition de l’objet fonctionnel.

 

- La troisième et dernière étape consistera à projeter un programme et un édifice sur le site, une fois l’événement passé, en prenant en compte les traces qu’il a laissées sur la physionomie de la place et sur la mémoire des habitants du quartier et/ou de la ville. Les étudiants seront amenés à se demander si ce nouvel édifice et ce nouveau programme viennent pour éviter-empêcher de nouveaux événements, ou au contraire pour instituer l’événement dans la durée, ou encore pour en garder la mémoire. Cette étape donnera lieu aux dessins d’architecture (plans, coupes, élévations, axonométries et perspectives), à la maquette d’architecture, tout en cherchant une continuité avec les modes de représentation issus des deux premières phases. Car si l’édifice est imprégné des événements, les modes de représentations de l’architecture seront aussi influencés par les outils de la scénographie.
Le projet architectural, dans sa présence discrète, sera au centre de notre ré exion, associant, histoires, scénographie et culture urbaine.

 

Bibliographie

Thierry Paquot, "L’espace public", éd. La Découverte, Paris 2009.
Judy Rebick, "Le mouvement Occupy, nous sommes les 99%", éd. Hermann, Paris, 2014. Jean-Louis Déotte, "L’époque des appareils", éd. Lignes &Manifestes, Paris, 2004.
Kamel Daoud, "Les révolutions arabes sont dans la place", article mis à jour le 14 avr. 2011, dans Slateafrique.com.

Jacques Beauchard, "Révoltes et révolutions arabes : contagion et transition", Publié le septembre 21, 2011

bottom of page